PAPEETE, le 21 décembre 2015. Pour la première fois, un inventaire détaillé de la flore polynésienne a été réalisé. Il révèle que deux tiers de nos plantes endémiques sont menacés. Cet état des lieux permettra à la Direction de l'environnement de cibler au mieux ses actions.
Pendant trois ans, des spécialistes, dont la Société d’ornithologie de Polynésie, ont réalisé avec la Direction de l'environnement un état des lieux de la faune et de la flore au fenua. Ces résultats ont été compilés dans la Liste rouge des espèces menacées en France publiée jeudi par le Comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et le Muséum national d’Histoire naturelle. Cet inventaire est "très préoccupant", note ce dernier. Deux tiers des plantes endémiques et la moitié des oiseaux apparaissent en effet menacés, dont de nombreuses espèces uniques au monde.
La flore et les oiseaux sont soumis à de nombreuses menaces, au premier rang desquelles les espèces végétales et animales introduites par l’homme, devenues envahissantes. Leur propagation et leur prolifération altèrent profondément l’équilibre écologique des milieux naturels, jusqu’à pousser des espèces indigènes et endémiques au bord de l’extinction.
Le Miconia, introduit comme plante ornementale à Tahiti en 1937, a ainsi envahi plusieurs îles de l’archipel de la Société, où il recouvre et domine progressivement les forêts humides de basse et moyenne altitude, mettant en péril la survie de nombreuses espèces.
Les rats, eux, sont les principaux responsables de l’effondrement de nombreuses espèces d’oiseaux. Le Monarque de Fatu Hiva, dont la population est désormais réduite à moins de 30 oiseaux, est ainsi classé "En danger critique". Les rats dévorent également les fruits et les graines d’un grand nombre de plantes endémiques, menaçant directement leur régénération, comme l’arbre Rauvolfia nukuhivensis, classé "En danger critique" et dont il ne reste plus que 70 pieds vivants. Les chats, les chiens et des oiseaux introduits représentent aussi une menace majeure pour de nombreux oiseaux indigènes, qui n’ont pas développé de mécanismes de défense ou de fuite face à la prédation.
Le surpâturage des chèvres, des moutons et des bovins ou l’impact des cochons sauvages sont également responsables de dégradations marquées des habitats naturels. Ces derniers sont par exemple un facteur de menace pour le Tiare ’apetahi, arbuste emblématique de Polynésie française aujourd’hui "En danger critique", ou pour des oiseaux nichant au sol comme le Pétrel de Tahiti, classé "Quasi menacé".
L'action de l'homme est aussi néfaste : en aménageant toujours plus le littoral et les vallées, les milieux naturels reculent.
Un tiers des oiseaux disparu
Au-delà même des espèces menacées, un tiers des espèces d’oiseaux présentes en Polynésie française avant l’arrivée de l’homme a déjà disparu, comme la Perruche de Tahiti ou la Rousserolle des Gambier. Certaines de ces extinctions ont aujourd’hui des conséquences pour d’autres espèces. La disparition des oiseaux frugivores, qui contribuaient à la dissémination des graines, a ainsi entraîné la fragmentation et l’isolement de plusieurs plantes endémiques, dont la survie est désormais menacée.
Cet inventaire permet d'avoir un véritable état des lieux de la faune et de la flore au fenua. Si grâce aux travaux de l'association SOP –Manu, on connaissait déjà beaucoup de choses sur la population des oiseaux polynésiens, c'est la première fois qu'un recensement détaillé de la flore est réalisé. Il permettra à la Direction de l'environnement de cibler au mieux ses actions. Celle-ci s'est fixée pour mission de préserver les espaces, de lutter contre les espèces envahissantes et de protéger les espèces menacées.
Pendant trois ans, des spécialistes, dont la Société d’ornithologie de Polynésie, ont réalisé avec la Direction de l'environnement un état des lieux de la faune et de la flore au fenua. Ces résultats ont été compilés dans la Liste rouge des espèces menacées en France publiée jeudi par le Comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et le Muséum national d’Histoire naturelle. Cet inventaire est "très préoccupant", note ce dernier. Deux tiers des plantes endémiques et la moitié des oiseaux apparaissent en effet menacés, dont de nombreuses espèces uniques au monde.
La flore et les oiseaux sont soumis à de nombreuses menaces, au premier rang desquelles les espèces végétales et animales introduites par l’homme, devenues envahissantes. Leur propagation et leur prolifération altèrent profondément l’équilibre écologique des milieux naturels, jusqu’à pousser des espèces indigènes et endémiques au bord de l’extinction.
Le Miconia, introduit comme plante ornementale à Tahiti en 1937, a ainsi envahi plusieurs îles de l’archipel de la Société, où il recouvre et domine progressivement les forêts humides de basse et moyenne altitude, mettant en péril la survie de nombreuses espèces.
Les rats, eux, sont les principaux responsables de l’effondrement de nombreuses espèces d’oiseaux. Le Monarque de Fatu Hiva, dont la population est désormais réduite à moins de 30 oiseaux, est ainsi classé "En danger critique". Les rats dévorent également les fruits et les graines d’un grand nombre de plantes endémiques, menaçant directement leur régénération, comme l’arbre Rauvolfia nukuhivensis, classé "En danger critique" et dont il ne reste plus que 70 pieds vivants. Les chats, les chiens et des oiseaux introduits représentent aussi une menace majeure pour de nombreux oiseaux indigènes, qui n’ont pas développé de mécanismes de défense ou de fuite face à la prédation.
Le surpâturage des chèvres, des moutons et des bovins ou l’impact des cochons sauvages sont également responsables de dégradations marquées des habitats naturels. Ces derniers sont par exemple un facteur de menace pour le Tiare ’apetahi, arbuste emblématique de Polynésie française aujourd’hui "En danger critique", ou pour des oiseaux nichant au sol comme le Pétrel de Tahiti, classé "Quasi menacé".
L'action de l'homme est aussi néfaste : en aménageant toujours plus le littoral et les vallées, les milieux naturels reculent.
Un tiers des oiseaux disparu
Au-delà même des espèces menacées, un tiers des espèces d’oiseaux présentes en Polynésie française avant l’arrivée de l’homme a déjà disparu, comme la Perruche de Tahiti ou la Rousserolle des Gambier. Certaines de ces extinctions ont aujourd’hui des conséquences pour d’autres espèces. La disparition des oiseaux frugivores, qui contribuaient à la dissémination des graines, a ainsi entraîné la fragmentation et l’isolement de plusieurs plantes endémiques, dont la survie est désormais menacée.
Cet inventaire permet d'avoir un véritable état des lieux de la faune et de la flore au fenua. Si grâce aux travaux de l'association SOP –Manu, on connaissait déjà beaucoup de choses sur la population des oiseaux polynésiens, c'est la première fois qu'un recensement détaillé de la flore est réalisé. Il permettra à la Direction de l'environnement de cibler au mieux ses actions. Celle-ci s'est fixée pour mission de préserver les espaces, de lutter contre les espèces envahissantes et de protéger les espèces menacées.
Espèces en danger critique
Le Tiare 'apetahi, endémique de trois plateaux volcaniques de l’île de Raiatea, " En danger critique" © Frédéric Jacq
Tiare 'apetahi
Strictement endémique de trois hauts plateaux volcaniques de l’île de Raiatea, ce petit arbuste est le symbole de la flore endémique menacée de Polynésie française et l’une des plantes les plus importantes de la culture tahitienne. La beauté de sa fleur lui vaut une cueillette excessive depuis des décennies. Malgré sa protection par la réglementation depuis 1996, les pressions restent nombreuses pour cette espèce, victime d’une consommation de ses rameaux par les rats, de la détérioration de son habitat par les cochons sauvages et par l’invasion de plantes introduites, et d’un champignon pathogène. Confiné en petits effectifs sur les bordures et falaises des plateaux, le Tiare ‘apetahi ne doit sa survie qu’à sa longévité, malgré une croissance extrêmement lente. Ses populations font l’objet d’une dératisation mensuelle et de renforcements par plantation. Des actions de lutte contre les principales plantes envahissantes sont également menées sur certains plateaux abritant l’espèce.
Strictement endémique de trois hauts plateaux volcaniques de l’île de Raiatea, ce petit arbuste est le symbole de la flore endémique menacée de Polynésie française et l’une des plantes les plus importantes de la culture tahitienne. La beauté de sa fleur lui vaut une cueillette excessive depuis des décennies. Malgré sa protection par la réglementation depuis 1996, les pressions restent nombreuses pour cette espèce, victime d’une consommation de ses rameaux par les rats, de la détérioration de son habitat par les cochons sauvages et par l’invasion de plantes introduites, et d’un champignon pathogène. Confiné en petits effectifs sur les bordures et falaises des plateaux, le Tiare ‘apetahi ne doit sa survie qu’à sa longévité, malgré une croissance extrêmement lente. Ses populations font l’objet d’une dératisation mensuelle et de renforcements par plantation. Des actions de lutte contre les principales plantes envahissantes sont également menées sur certains plateaux abritant l’espèce.
Tu’eiao
Le Tu’eiao est un arbre endémique des îles de Nuku Hiva et Ua Huka aux Marquises. Cette espèce ne se développe que dans les forêts les plus sèches des Terres-désertes, généralement sur les pentes externes des volcans, jusqu’à 700 m d’altitude. Bien connue des habitants de Nuku Hiva, son écorce est encore régulièrement utilisée dans la pharmacopée marquisienne. Des inventaires récents ont abouti au recensement d’environ 70 pieds vivants et d’une centaine de pieds morts. Les pieds relictuels sont actuellement menacés par le surpâturage des herbivores, le développement de cochenilles et de scolytes dans les rameaux, la compétition avec des plantes exotiques envahissantes et plus localement la surexploitation de leur écorce. Les graines sont quant à elles largement dévorées par les rats introduits. Depuis 2006, la mise en défens de plusieurs pieds, la multiplication en pépinière et le développement d’une plantation conservatoire sont quelques-unes des actions de conservation mises en place au profit de cette espèce.
Le Tu’eiao est un arbre endémique des îles de Nuku Hiva et Ua Huka aux Marquises. Cette espèce ne se développe que dans les forêts les plus sèches des Terres-désertes, généralement sur les pentes externes des volcans, jusqu’à 700 m d’altitude. Bien connue des habitants de Nuku Hiva, son écorce est encore régulièrement utilisée dans la pharmacopée marquisienne. Des inventaires récents ont abouti au recensement d’environ 70 pieds vivants et d’une centaine de pieds morts. Les pieds relictuels sont actuellement menacés par le surpâturage des herbivores, le développement de cochenilles et de scolytes dans les rameaux, la compétition avec des plantes exotiques envahissantes et plus localement la surexploitation de leur écorce. Les graines sont quant à elles largement dévorées par les rats introduits. Depuis 2006, la mise en défens de plusieurs pieds, la multiplication en pépinière et le développement d’une plantation conservatoire sont quelques-unes des actions de conservation mises en place au profit de cette espèce.
L’espèce Pacifigeron rapensis, endémique de l’île de Rapa, classée "En danger critique" © Jean-Yves Meyer
Pacifigeron rapensis
Endémique de l’île volcanique haute de Rapa dans l’archipel des Australes, cette petite plante au port prostré de 10 à 50 cm ne se rencontre actuellement qu’au sommet du mont Perau (culminant à 650 m), sur les crêtes et les fortes pentes exposées. Elle est aisément reconnaissable à ses feuilles coriaces et à ses deux types de fleurs : jaunes au centre et blanches à la périphérie. Encore présente sur plusieurs stations dans les années 1930, cette espèce n’est plus connue depuis les années 2000 que d’une vingtaine d’individus recensés dans deux populations situées entre 500 et 600 m d’altitude. Son habitat a fortement régressé en raison du surpâturage causé par les ongulés herbivores en liberté (notamment chèvres, chevaux et bovins), les feux et les plantes introduites envahissantes.
Endémique de l’île volcanique haute de Rapa dans l’archipel des Australes, cette petite plante au port prostré de 10 à 50 cm ne se rencontre actuellement qu’au sommet du mont Perau (culminant à 650 m), sur les crêtes et les fortes pentes exposées. Elle est aisément reconnaissable à ses feuilles coriaces et à ses deux types de fleurs : jaunes au centre et blanches à la périphérie. Encore présente sur plusieurs stations dans les années 1930, cette espèce n’est plus connue depuis les années 2000 que d’une vingtaine d’individus recensés dans deux populations situées entre 500 et 600 m d’altitude. Son habitat a fortement régressé en raison du surpâturage causé par les ongulés herbivores en liberté (notamment chèvres, chevaux et bovins), les feux et les plantes introduites envahissantes.
Cyrtandra elizabethae
Uniquement connu de quelques localités sur les îles hautes de Raivavae et Rurutu dans l’archipel des Australes, cet arbuste de 2 à 5 m est caractérisé par de grandes fleurs blanches très odorantes. Il est présent en forêt humide de moyenne altitude, entre 100 et 350 m, souvent en sous-bois ombragé et en bordure de rivière, parfois sur des zones plus exposées. Ses fruits, des baies charnues de forme ovale et de couleur orange, étaient consommés par les oiseaux endémiques frugivores qui participaient ainsi à la dissémination des graines. La disparition de ces oiseaux dans les îles où vit Cyrtandra elizabethae est à l’origine d’une importante fragmentation des populations de l’espèce. Le surpâturage par les chèvres en liberté, les feux et l’invasion par des plantes introduites telles que l’arbuste Tecoma stans et l’arbuste épineux Lantana camara, ont sévèrement réduit son habitat. L’espèce est aujourd’hui limitée à quelques vallons humides sur des pentes fortes, comme sous le mont Manureva à Rurutu.
Uniquement connu de quelques localités sur les îles hautes de Raivavae et Rurutu dans l’archipel des Australes, cet arbuste de 2 à 5 m est caractérisé par de grandes fleurs blanches très odorantes. Il est présent en forêt humide de moyenne altitude, entre 100 et 350 m, souvent en sous-bois ombragé et en bordure de rivière, parfois sur des zones plus exposées. Ses fruits, des baies charnues de forme ovale et de couleur orange, étaient consommés par les oiseaux endémiques frugivores qui participaient ainsi à la dissémination des graines. La disparition de ces oiseaux dans les îles où vit Cyrtandra elizabethae est à l’origine d’une importante fragmentation des populations de l’espèce. Le surpâturage par les chèvres en liberté, les feux et l’invasion par des plantes introduites telles que l’arbuste Tecoma stans et l’arbuste épineux Lantana camara, ont sévèrement réduit son habitat. L’espèce est aujourd’hui limitée à quelques vallons humides sur des pentes fortes, comme sous le mont Manureva à Rurutu.
Vulnérable
La variété endémique de Sesbania coccinea (sous-espèce atollensis variété atollensi), classée "Vulnérable" © Jeau-François Butaud
‘Ofai
Cet arbuste, connu aussi sous les noms paumotu Kofai, Faifai, se développe préférentiellement sur les sols sableux d’atolls régulièrement mis à nu par la houle des bords de lagon. Il peut disparaître plusieurs années, lorsque la végétation se développe, et réapparaître à la faveur des houles qui remettent en surface ses graines. Ses fleurs orange à rouge chamarrées de jaune sont traditionnellement employées pour ornementer les cheveux tandis que ses tiges droites sont utilisées dans la confection de manches de javelots. L’espèce est aujourd’hui en déclin sur l’ensemble de son aire de répartition, en raison de l’intensification de la coprahculture et des défrichements réguliers, par coupe ou incendie de la végétation naturelle sous cocoteraie. Par ailleurs, les rats introduits peuvent consommer ses gousses, notamment en période sèche. Malgré son intégration à la liste des espèces protégées par la réglementation polynésienne depuis 2006, cette espèce a déjà disparu de plusieurs atolls.
Extraits de UICN France, MNHN et Diren Polynésie française (2015). La liste rouge des espèces menacées en France. Chapitre Flore vasculaire endémique de Polynésie française.
Cet arbuste, connu aussi sous les noms paumotu Kofai, Faifai, se développe préférentiellement sur les sols sableux d’atolls régulièrement mis à nu par la houle des bords de lagon. Il peut disparaître plusieurs années, lorsque la végétation se développe, et réapparaître à la faveur des houles qui remettent en surface ses graines. Ses fleurs orange à rouge chamarrées de jaune sont traditionnellement employées pour ornementer les cheveux tandis que ses tiges droites sont utilisées dans la confection de manches de javelots. L’espèce est aujourd’hui en déclin sur l’ensemble de son aire de répartition, en raison de l’intensification de la coprahculture et des défrichements réguliers, par coupe ou incendie de la végétation naturelle sous cocoteraie. Par ailleurs, les rats introduits peuvent consommer ses gousses, notamment en période sèche. Malgré son intégration à la liste des espèces protégées par la réglementation polynésienne depuis 2006, cette espèce a déjà disparu de plusieurs atolls.
Extraits de UICN France, MNHN et Diren Polynésie française (2015). La liste rouge des espèces menacées en France. Chapitre Flore vasculaire endémique de Polynésie française.