PAPEETE, le 24 mars 2017 - Ce vendredi, une audience a eu lieu au tribunal administratif de Papeete suite au marché public du bitumage des routes de Polynésie attribué le 3 mars à l'entreprise Boyer. Les sociétés dont l'offre a été rejetée ont déposé un référé comme l'a révélé cette semaine Radio 1.
C'est une affaire de "noir" (bitumage) qui fait des étincelles. Ce vendredi, après un premier report d'audience, le tribunal administratif a examiné deux requêtes en référé précontractuel de la société Bernard Travaux Polynésie, composé de trois entreprises, et celle de Interoute. Les deux requérants contestent la manière dont a été attribué le marché public pour la réfection des routes en Polynésie à la société Boyer le 3 mars dernier. L'estimation de ce marché à bons de commande se chiffre à trois milliards de francs et s'étalera sur trois ans. Dans une salle de tribunal aux allures de scène de théâtre, les répliques, entrecoupées de piques, ont fusé.
C'est une affaire de "noir" (bitumage) qui fait des étincelles. Ce vendredi, après un premier report d'audience, le tribunal administratif a examiné deux requêtes en référé précontractuel de la société Bernard Travaux Polynésie, composé de trois entreprises, et celle de Interoute. Les deux requérants contestent la manière dont a été attribué le marché public pour la réfection des routes en Polynésie à la société Boyer le 3 mars dernier. L'estimation de ce marché à bons de commande se chiffre à trois milliards de francs et s'étalera sur trois ans. Dans une salle de tribunal aux allures de scène de théâtre, les répliques, entrecoupées de piques, ont fusé.
"LE POISSONNIER QUI SE VEUT BOULANGER"
Pour les sociétés requérantes, spécialistes du bitumage depuis des années, la société Boyer, colosse de la construction mais nouvelle dans le domaine du "noir" n'a pas les compétences pour assurer le marché. "Il y a eu une erreur manifeste d'appréciation dans cet appel d'offres, a argumenté, Maitre Eftimie-Spitz, conseil de la société Bernard Travaux Polynésie. Selon elle, l'entreprise Boyer ne justifie pas de travaux d'enrobés en Polynésie française. "Il n'a jamais fait de pain et ne peut pas en faire : il n'a ni farine, ni four."
Dans ce marché à bons de commande, l'attributaire du marché doit être capable de commencer les travaux au plus vite. Pour les sociétés requérantes, l'entreprise Boyer n'est pas en mesure de le faire, faute d'une centrale d'enrobage installée sur le territoire. "C'est le poissonnier qui se veut boulanger", a ironisé Maitre Mestre, avocat de JL Polynésie, filant la métaphore de sa consœur.
Dans ce marché à bons de commande, l'attributaire du marché doit être capable de commencer les travaux au plus vite. Pour les sociétés requérantes, l'entreprise Boyer n'est pas en mesure de le faire, faute d'une centrale d'enrobage installée sur le territoire. "C'est le poissonnier qui se veut boulanger", a ironisé Maitre Mestre, avocat de JL Polynésie, filant la métaphore de sa consœur.
"UN CARTEL" DES SOCIÉTÉS DE BITUMAGE
Pour sa part, la Polynésie a assuré que la société Boyer a toutes les compétences pour répondre à ce marché. A son tour, l'avocat de la défense a balayé les arguments du banc d'en face d'une phrase aux mots choisis : "Nous sommes face à un cartel qui veut éviter qu'un nouveau concurrent fasse son entrée sur le marché."
La défense était auparavant revenue sur la précédente attribution d'un marché de ce type à un groupement de société, alors composé des quatre sociétés aujourd'hui requérantes. "Le marché n'était pas caractérisé par une grande concurrence. Aujourd'hui, nous avons trois sociétés qui forment un groupement et une société qui n'en est pas membre, mais c'est tout comme."
Il a par ailleurs insisté sur l'expérience de son client dans des travaux de routes bétonnées "qui ont des similitudes avec des routes bitumées." Cet argument a suscité des mouvements de contestation et des rires étouffés dans la salle. Quant à la question de la centrale, la société Boyer a précisé dans son offre qu'elle l'aurait. "Nous ne l'avons pas encore, où est le problème?", a interrogé la défense avant ajouter que si l'appel d'offres exigeait d'avoir cette centrale, il y aurait là délit de favoritisme. "D'ailleurs, les routes ici sont en très mauvais état, ce n'est peut-être pas sans lien…", a-t-il glissé.
L'autre moyen des requérants dans ce référé est l'insuffisance des informations. Ils ont estimé ne pas avoir eu assez d'éléments concernant les conditions sur le travail de nuit. Les sociétés ont envoyé une question au ministère de l'Équipement restée sans réponse. "Il y une possibilité d'interrogation et la réponse est obligatoire", a précisé Maitre Mestre. Or, pour la Polynésie, la réponse était stipulée dans l'appel d'offres. Du côté de la défense, ce courrier n'avait que pour objet de "faire pression sur le ministre."
Au terme de plus de deux heures d'échanges houleux et animés, le président du tribunal a levé la séance. Ce samedi, la décision est tombée : les deux requêtes ont été rejetées. La SA Interoute et la SA Bernard Travaux Polynésie sont condamnées à payer 300 000 francs chacune à l'entreprise Boyer qui reste attributaire du marché. Un marché à 3 milliards de francs.
La défense était auparavant revenue sur la précédente attribution d'un marché de ce type à un groupement de société, alors composé des quatre sociétés aujourd'hui requérantes. "Le marché n'était pas caractérisé par une grande concurrence. Aujourd'hui, nous avons trois sociétés qui forment un groupement et une société qui n'en est pas membre, mais c'est tout comme."
Il a par ailleurs insisté sur l'expérience de son client dans des travaux de routes bétonnées "qui ont des similitudes avec des routes bitumées." Cet argument a suscité des mouvements de contestation et des rires étouffés dans la salle. Quant à la question de la centrale, la société Boyer a précisé dans son offre qu'elle l'aurait. "Nous ne l'avons pas encore, où est le problème?", a interrogé la défense avant ajouter que si l'appel d'offres exigeait d'avoir cette centrale, il y aurait là délit de favoritisme. "D'ailleurs, les routes ici sont en très mauvais état, ce n'est peut-être pas sans lien…", a-t-il glissé.
L'autre moyen des requérants dans ce référé est l'insuffisance des informations. Ils ont estimé ne pas avoir eu assez d'éléments concernant les conditions sur le travail de nuit. Les sociétés ont envoyé une question au ministère de l'Équipement restée sans réponse. "Il y une possibilité d'interrogation et la réponse est obligatoire", a précisé Maitre Mestre. Or, pour la Polynésie, la réponse était stipulée dans l'appel d'offres. Du côté de la défense, ce courrier n'avait que pour objet de "faire pression sur le ministre."
Au terme de plus de deux heures d'échanges houleux et animés, le président du tribunal a levé la séance. Ce samedi, la décision est tombée : les deux requêtes ont été rejetées. La SA Interoute et la SA Bernard Travaux Polynésie sont condamnées à payer 300 000 francs chacune à l'entreprise Boyer qui reste attributaire du marché. Un marché à 3 milliards de francs.